Más distinguidas

1997
Spectacle/ Danse/ Théâtre Más distinguidas rassemble les numéros 14 à 26 des Pièces distinguées et fut inaugurée en octobre 1997 à Madrid. Elle suit le motif mis en place dans les premières pièces distinguées de 1993-1994 : toutes les pièces sont courtes et commencent par La Ribot nue, la plupart employant un objet de tous les […]

Spectacle/ Danse/ Théâtre

Más distinguidas rassemble les numéros 14 à 26 des Pièces distinguées et fut inaugurée en octobre 1997 à Madrid. Elle suit le motif mis en place dans les premières pièces distinguées de 1993-1994 : toutes les pièces sont courtes et commencent par La Ribot nue, la plupart employant un objet de tous les jours ou un vêtement comme moteur de l’action. L’écrivaine Irène Filiberti remarque que dans les Pièces distinguées, La Ribot présente son propre corps comme « un objet d’art » : « tous deux considérés comme des objets, et de la matière vivante ». Ceci est vrai pour le projet dans son ensemble, mais lorsqu’il s’agit de comparer la première série des Pièces distinguées à celle de Más distinguidas, nous observons un changement de paradigme : le traitement réservé au corps de la performeuse live se rapproche de plus en plus de celui accordé aux objets inanimés ; déjà latent dans les pièces de 1993-1994, cet aspect devient de plus en plus prégnant.

Dans Manuel de uso (pièce n° 20, 1997), La Ribot met en scène une confusion particulièrement ironique et drôle entre des corps vivants et des choses inanimées. Elle lit tout haut une liste d’instructions opératoires tirées de modes d’emploi d’objets de consommation et tente ensuite de les appliquer à son propre corps. Certains sont réalisables tandis que d’autres conduisent à des manœuvres absurdes ou même risquées. Un germe de doute s’installe : sommes-nous véritablement maîtres de tous les objets qui nous entourent, ou serait-ce eux – plus raisonnablement – qui nous contrôlent ? Narcisa (n° 16, 1996) engendre un autre type de confusion, cette fois entre les images et le réel. La Ribot prend des photos Polaroïd de ses seins et de son mont de Vénus puis colle les photos sur les parties qu’elles représentent. Cachant et révélant simultanément son corps dénudé, les photos développent peu à peu, tout en les désignant, deux rapports également périlleux : celui entre la réalité et la représentation, et celui entre féminisme et représentation du corps féminin.

Si Narcisa fait référence à Magritte et à sa pipe, Divana (n° 25, 1997) s’amuse du travail d’Yves Klein et de John Cage. Vêtue d’un costume bleu-marine grotesque et portant une perruque, La Ribot est assise sur scène, tenant un petit ventilateur à batteries et un chronomètre, et exhorte le public à tenter quatre minutes d’immobilité. La première est dédiée à la « réflexion », la suivante à la « méditation », la troisième à la « contemplation » tandis que la dernière l’est simplement à un « silence ». Chaque définition de La Ribot déclenche le rire, mais contient une critique en retour. Lorsqu’en 1957 Klein place différents prix sur un groupe de monochromes identiques, il l’explique en disant qu’ils reflètent la « sensibilité picturale » de chacune de ces œuvres, laissant inexplicité le geste quant à sa nature d’esprit brumeux sincère ou de canular avant-gardiste. La pièce de La Ribot intitulée Divana saisit au corps ces types de disputes auctoriales et suggère un scepticisme plus généralisé sur le spiritualisme à l’eau de rose fréquemment à l’œuvre dans l’art de la performance. Tel que Cage l’a compris, le silence n’a pas besoin d’un éclat transcendantal afin d’accéder à l’état d’objet esthétique. À chaque silence de Divana, le petit ventilateur vrombit loyalement : le « son ambiant » et artificiel soulignant la référence plus affectueuse à Cage.

crédits

Premiere November 21st-23rd 1997 - Desviaciones, Madrid, Spain. Second series of the ’distinguished pieces’. Duration: 60min Written and Directed: La Ribot. Performer: La Ribot. Lighting Design: Daniel Demont. Divana costume, 19 esquilibrios y un largo costume & Angelita wings: Pepe Rubio. Music: Erik Satie, Javier Lopez de Guereña, Rubén Gonzalez, Carles Santos. Produced by La Ribot, Supported by INAEM, Ministry of Culture of Spain and the collaboration of ICA, Live Arts, London, Danças Na Cidade, Lisbon, and the distinguished proprietors. An Artsadmin associated project.

ressources

calendrier